Voici un extrait de ce que je co-écris avec quelqu'un. La narration est un des points forts de notre roman, et je pense que certaine personnes reconnaitront surement le coup de patte d'un certain écrivain.
La main, aboutissement final d'un ingénieux réseau de câbles et d'autoroutes desservant avec minutie le message établissant la relation directe entre l'action et l'idée. Ce formidable pantin souvent vu comme le maître absolu de nos gestes, est en fait soumis à la propre volonté de nos pensées. Cette main qui vous essuie, vous gratte, et vous masturbe les nuits passées devant la télévision, objet avilissant et hypnotisant de l'esprit. C'est cette pince qui retire cette énième bombe à retardement cylindrique connue pour consumer peu à peu nos poumons. Au moment ou résonne dans cette petite cellule qui me sert d'appartement le crissement émanant du contact d'un bout de métal et d'une pierre, ce sont des millions de personne qui en m'imitant, mettent consciencieusement leur vie en danger.
J'inhale le dernier nuage de fumée, j'écrase ma cigarette dans le cendrier. Une petite douleur dans le bas du ventre, sonnerie insupportable d'un pénitencier crevant les tympans, m'avertit qu'il est temps de soulager l'organe se remplissant heure après heure d'un liquide verdâtre et nauséabond appelé urine. Le corps reprend le dessus sur l'esprit, je retourne à ce rituel quotidien répétant les mêmes gestes. La porte s'ouvre et me plonge dans une lumière froide et éclatante reflétée sur les murs inhospitaliers, dépourvus d'âme et de vie. J'appelle ça la condition absolue au suicide, l'alliance d'un sentiment d'angoisse à une envie de te voir braquer un flingue sur ma tempe et presser la détente pour repeindre le tout d'un rouge vif. Dans le couloir, la chaleur du carrelage usé par les vas et viens des habitants sous mes pieds nus me rappelle celle d'un iceberg, et les motifs, le test oculaire d'un vieillard aveugle.
Dans cette pièce transitoire ne règne que le bruit lourd de mes talons et son de mes doigts frottant sur les radiateurs contigus aux parois de cette boite rectangulaire. Le consensus tacite parfait entre le silence de plomb de mon appartement et la crise de spasmophilie orgasmique de ma voisine.
Je vous demande une extrème indulgence pour un travail qui, au jour d'aujourd'hui, n'est pas le seul pour moi.
J'adore avoir quelque chose à écrire et à étoffer; est-ce un crime ?
Alors qu'en pensez-vous ?